YOU CAN'T BE MY VALENTINE

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Rap & Fashion // Mode & Rap

EN FRANÇAIS

Après avoir été égérie du mauvais gout pendant quelques années, on a vu apparaître sur les défilés de prêt à porter l’accessoire atypique qu’est le bob. Puis sont venues les sacoches, les bananes, et les claquettes qu’on voit aujourd’hui partout (et même en dehors de la piscine municipale). Le streetwear a fait une entrée fracassante dans le monde de la mode – et même si, à première vue, c’est une entrée assez soudaine, bon nombre d’influences se sont fait ressentir progressivement, notamment par le biais le monde du rap.

Il y a quelques mois je vous expliquais l’importance du rap dans notre société et comment il était assez stigmatisé (surtout pour les rappeurs eux-mêmes). Du coup, j’ai pensé qu’il intéressant, cette semaine, de vous parler un peu de comment ce monde de la rue a fini par influencer ceux qui se croyaient et se voulaient un peu plus supérieurs – un peu plus haut de gamme.

L’exemple le plus utilisé dans ce qu’on appelle la « récupération » d’une marque, c’est celui du célèbre crocodile Lacoste. Tout commence en 1998, quand un groupe de rap, ärsenik, décident de poser avec un sweat Lacoste sur la couverture de leur album "Quelques gouttes suffisent".

La couverture de l'album d'arsenik, quelques gouttes suffisent.

Dans une interview pour le site Noisey en 2015, Lino explique que ça a simplement commencé par un peu d’ironie – la marque habille alors toute la petite bourgeoisie parisienne et se veut très huppée. Peu à peu, en commençant la musique, ils accentuent le style et finissent par lancer une mode. Le croco se popularise petit à petit.

Ce qui reste assez surprenant, c’est que ni la marque ni le groupe ne voudront signer un contrat de sponsoring ensemble. L’un trouve l’autre trop éloigné de sa clientèle, et l’autre préfère ne pas être sérieusement assimilé à une marque aussi prout-prout.

Le vrai problème pour la marque arrive quand les golfeurs du dimanche et les tennisman cessent d’acheter des polos, de peur de ressembler aux jeunes de cités. Une partie de la clientèle Lacoste se fait la malle, la marque, elle, va mal. Lacoste riposte avec Lacoste Live, une collection qui se veut très jeune et pop.

Aujourd’hui la marque embrasse plus ou moins son coté street – Hugo TSR, Deen Burbigo, Ninho, etc. s’affichent tous en Lacoste – jusqu’au dernier poulain du Rap Français, Moha La Squale, invité au dernier défilé et égérie de la marque à ce jour.

Seul sur le banc de touche – Roméo Elvis. Le rappeur belge, grand amoureux du crocodile depuis quelques années a expliqué sur twitter que la marque ne souhaitait pas collaborer avec lui sous prétexte qu’il « faisait du rap ». Si cette vision coïncide parfaitement avec les complexes de la marque du passé, elle semble être en contradiction avec l’affiliation de cette dernière avec Moha La Squale. En effet, le rappeur Belge s'affiche toujours avec le logo vert en public - il a même fait la promo de la collaboration Lacoste x Supreme sans qu'on lui ait demandé, et continue de se balader constamment avec un crocodile gonflable vert à ses concerts. Si la maison lui a donné comme raison pour son refus le fait qu'il fasse du rap, on ne peut que penser que la justification soit toute autre : Moha La Squale étant très clairement issu du monde urbain (on rappellera qu'il a fait un peu de prison - même si tous les rappeurs/les jeunes de cité n'ont ni fait de prison ni été des délinquants, soyons bien d'accord). 

IN ENGLISH

After having been the muse of bad taste for a few years, the atypical bob pooped up on ready to wear catwalks. Then came the satchels, the fanny packs, and even the sliders that we see everywhere today (even outside the public swimming pool). Streetwear has made a sensational entry into the world of fashion - and although, at first sight, it seems rather sudden, the influences have come in gradually, notably through the world of rap.

 

A few months ago I explained the importance of rap in our society and how it was quite stigmatized (especially for the rappers themselves) on my blog. So I thought it would be interesting, for this week's topic, to tell you a little bit about how this world of the streets ended up influencing the high ends of society.


In France, the most common example in what is called " recuperation " of a brand is that of the famous Lacoste crocodile. It all started in 1998, when a french rap group, ärsenik, decided to pose with a Lacoste sweatshirt on the cover of their album "Quelques gouttes suffisent" ("A few drops are enough").

 

 

The group was always wearing Lacoste.

In an interview for the Noisey website in 2015, Lino, on e of the rappers of the group, explains that it simply started with a hint of irony - the brand then dresses the entire Parisian petty bourgeoisie and seeks to be very posh. Gradually, through the music, they accentuate the style and end up launching a fashion trend. The crocodile is becoming popular over time.

What remains quite surprising is that neither the brand nor the group will want to sign a sponsorship contract with one another. One finds the other too far away from its customers, and the other prefers not to be seriously assimilated to such a high-class brand.

 

The real problem for the brand came when Sunday golfers and tennis players stopped buying polo shirts, for fear of looking like young people in urban areas. Some of Lacoste's customers are running away - the brand is in trouble. Lacoste retorts with Lacoste Live, a collection that wants to be very young and pop.

Today the brand more or less embraces its street side - well-renowned french rappers like Hugo TSR, Deen Burbigo, Ninho, etc. all appear in Lacoste - all leading to the collaboration of the brand with french rap's latest golden boy, Moha La Squale's invitation to the latest fashion show and muse of the brand to this day.

On the sidelines remains belgian rapper Romeo Elvis. Between his own initiative to promote the Lacoste x Supreme collaboration, his public appearances decorated with Lacoste clothing, his inflatable alligator that follows him to each and everyone of his concerts, you would have though that he'd be the first to get the precious collaboration. However, he explained on twitter that the brand did not want to collaborate with him under the pretext that he was "doing rap". If this vision perfectly coincides with the brand's past complexes, it seems to contradict its affiliation with Moha La Squale. One can only think that another justification is hiding between the short answer that was given to Romeo Elvis: Moha La Squale being very clearly from the urban world (we will remember that he did a little jail time - even if all the rappers/young people in the city have neither served time nor been delinquents, let's be clear on that).

 

On en arrive donc à une espèce d’influence des masses à distance, une récupération des produits de marques plutôt haut de gamme qui ne voient pas trop le coup arriver, mais qui finissent par accueillir à bras ouvert la collaboration avec le monde de la rue qui leur est offerte.

 

Et Romeo Elvis n’est pas le seul dans sa galère. Avant d’être le respecté « yeezus » qu’on connaît aujourd’hui, Kanye West a vu bon nombre de maisons de couture lui fermer la porte au nez. Pourtant, avant de lancer sa marque, le rappeur est bien attaché au monde de la mode. En 2011, c’est Riccardo Tisci, alors DA de Burberry, qui signe le designe de la pochette d’album de N****s in Paris, tube interplanétaire et premier titre de l’album collaboratif de Jay-Z et Kanye West. Ce dernier finira d’ailleurs sur la couverture de Vogue US à l’occasion d’un sujet sur le designer.

 

So we arrive at a kind of remote influence of the masses, a recuperation of products of rather high-end brands which do not see the blow happening too much, but which end up welcoming with open arms the collaboration with the world of the street which is offered to them.

However, the change took time, and Romeo Elvis isn't the only one in his misery. Before being the respected "yeezus" we know today, Kanye West saw many fashion houses close the door in his face - even though, before launching his brand, the rapper was well attached to the fashion world. In 2011, it was Riccardo Tisci, then Burberry's Designer, who signed the design for the album cover of N****s in Paris, an interplanetary hit and first track on the collaborative album by Jay-Z and Kanye West. The latter will end on the cover of Vogue US during a subject on the designer.

The album cover for N***** in Paris.

C’est finalement Jean Patou qui deviendra son mentor et l’aidera à travailler sur la première saison de Yeezy, la marque du rappeur originaire de Chicago. Cette difficulté, Kanye West l’explique par un aspect peut être trop commercial du point de vue du monde de la mode. Dans une interview avec Mouloud Achour pour Clique (voir ci-dessous), le rappeur donne son analyse – trop commercial, c’est peut-être toucher trop de monde et donc ne pas représenter le milieu du Luxe. D’un autre point de vue, il est peut-être trop égocentrique aux yeux de l’industrie d’Anna Wintour – peu importe. Pour Kanye, pas question de changer qui il est ou sa marque de fabrique, il trouvera bien quelqu’un avec qui travailler – et tant mieux pour nous, parce que 6 ans plus tard, Yeezy season 6 cartonne et est considérée comme une marque de prêt à porter des plus influentes dans le monde du streetwear.

Designer Jean Patou will finally become his mentor and help him work on the first season of Yeezy, the brand of the rapper from Chicago. Kanye West explains this challenge first because he might have seemed too commercial for the world of fashion. In an interview with Mouloud Achour for Clique (see below), the rapper gives his analysis - "too commercial" is perhaps the idea behind touching too many people and therefore not representing the world of luxury, meant for a smaller proportion of the population. From another point of view, he may be too egocentric in the eyes of Anna Wintour's industry - whatever. For Kanye, changing his trademark or his personality is out of the question - he will find someone to work with - and lucky for us, because 6 years later, Yeezy season 6 is a hit and is considered one of the most influential ready-to-wear brands in the streetwear world.

Kanye's interview with Mouloud Achour.

A couple of famous people wearing Kanye's clothing 

Mais ce n’est pas seulement les rappeurs qui font évoluer la mode, c’est même le R&B, la pop, et tout ce qui touche à la culture rap d’une façon ou d’une autre. La chanteuse Rihanna, intrinsèquement liée à ce milieu, collabore depuis quelques années avec la marque de sportswear Puma à travers Puma x Fenty (le nom de famille de la chanteuse). Elle défile à Paris, l’une des plus prestigieuses fashion week du monde, et propose un panel de looks extrêmement portés vers le streetwear, à base de doudounes, de sneakers déconstruites et de pantalons et écharpes oversized. Que ce soit l’engouement pour le style ou bien pour l’image de la chanteuse, peu importe – la marque cartonne et la collaboration continue. De simple influenceuse de style à créatrice de mode, la chanteuse aura donc bien imprimé le monde de la mode de sa patte streetwear, en passant par le monde du rap.

 

But it's not only rappers who are changing fashion, it's even R&B, pop, and everything related to rap culture in one way or another. The singer Rihanna, intrinsically linked to this milieu, has been collaborating for several years with the sportswear brand Puma through Puma x Fenty (the singer's family name). The catwalk was in Paris, one of the most prestigious fashion week in the world, and offers a panel of looks extremely focused on streetwear, based on down jackets, deconstructed sneakers and oversized trousers and scarves. Whether it's the craze for the style or the image of the singer, it doesn't matter - the brand is a hit and the collaboration continues. From a simple stylistic influence to a fashion designer, the singer has left her mark on the world of fashion from her streetwear touch to the world of rap.

En France chez puma, on retrouvera des rappeurs comme MHD (oui, c’est de l’afro-trap mais il est quand même du milieu, d’accord ?) ; il signe sa propre collection, Pukiwaga. L’ancien livreur de pizza vient d’ailleurs la présenter en scooter, marquant son côté fédérateur et soulignant qu’il n’oublie absolument pas là d’où il vient.

 

Chez adidas, le lien entre mode et rap est encore plus frappant – la marque multiplie les collaborations avec les rappeurs, entre la mise en musique de la collection Pogba x Adidas par Spri Noir qui finira d’ailleurs égérie de la marque en France, la collaboration avec Pharell Williams pour la originals HU (voir ci-dessous), , puis une autre collaboration inattendue entre Asap Rocky et Jeremy Scott (directeur artistique de la marque Moschino depuis 2013) et la marque de sportswear, on en finit plus de retrouver des sneakers sur les défilés, et les mêmes sur les afficionados dans la rue.

 

In France with Puma, we will find rappers like MHD signing their own collections - the way he did with Pukiwaga. The former pizza delivery guy has just presented it on a scooter, marking his unifying side and stressing that he does not forget where he comes from.

At adidas, the link between fashion and rap is even more striking - the brand multiplies collaborations with rappers, between the setting to music of the footballer's Pogba x Adidas collection by french rapper Spri Noir who will end up being the brand's muse in France, the coloration with Pharell Williams for the original HU (see below), and another unexpected collaboration between Adidas, A$ap Rocky and designer Jeremy Scott (the man behind Moschino'd creativity since 2013), there is no end to the presence of sneakers on catwalks during fashion week and on afficionados's feet on the streets.

 

 

Bon, je sais, adidas reste une marque de sport, donc si on y retrouve des rappeurs qui portent des habits activewear, la surprise reste minimale. Je comprends l’argument. Alors restons sur A$ap Rocky :

Le rappeur américain a toujours eu un goût prononcé pour la mode. En 2013, quand il sort Long.Live. A$ap, son style ne fait aucun doute – la mode fait partie intégrante de son personnage, de son image de figure publique.

En fait, si la mode est grandement influencée par la musique urbaine et par les milieux moins huppés de la société, les rappeurs, eux aussi, sont influencés par la mode – en gros, ça va dans les deux sens. A$AP Rocky nous crée donc quelques éditos pour Mr Porter et pour Vogue, nous offre quelques apparitions avec Raf Simons (un très grand couturier Belge aujourd’hui directeur de création chez Calvin Klein), et finit en couverture de Vogue avec sa chérie de l'époque, le mannequin Chanel Iman.

Well, I know, adidas is still a sports brand, so if you find rappers wearing activewear, the surprise is minimal. I understand the argument. So let's stay on A$ap Rocky:

The American rapper has always had a strong taste for fashion. In 2013, when he releases Long.Live. A$ap, his style is beyond doubt - fashion is an integral part of his character, of his image as a public figure.

In fact, if fashion is greatly influenced by urban music and by the less affluent sections of society, rappers, too, are influenced by fashion - basically, it goes both ways. So A$AP Rocky created  some editorials for Mr Porter and for Vogue, made some appearances with Raf Simons (a very great Belgian couturier, now creative director at Calvin Klein), and in Vogue with his then girlfriend Chanel Iman, for the September Issue cover of Vogue US (see below).

A$ap Rocky and Chanel Iman in vogue.

Quand on y réfléchit, ce côté « comme tout le monde », c’est peut-être un peu ce dont la mode avait tant besoin, et qu’elle a retrouvé grâce au streetwear que lui a offert le rap. Si les maisons de Luxe établissent les codes depuis des années, les masses, elles, ne se retrouvaient plus dans des habits trop stricts et des mannequins trop stéréotypés. En copiant le monde de la rue, tous les milieux sont décomplexés, ils retrouvent une espèce de simplicité et d’esprit de groupe qu’on ne retrouvait que très peu chez des Vuitton, des Gucci avant. En remettant le streetwear au gout du luxe, les grandes maisons se permettent de rassembler et de se faire se ressembler tous les milieux – une unité pour laquelle l’appétit du monde est grandissant.

When you think about it, maybe this new, fresh, comfortable, "look like anyone" look is just what fashion desperately needed, and found through the culture of rap. If Luxury houses have been establishing the codes of fashion for years, the masses on the other hand couldn't identify with the people they saw on runways anymore. First came the generation fo top models - faces you could recognise and trust, then came influencers, and now people just want to follow and look like the ones who criticise society and make things move. Conscious rapping became more and more important, rappers began to sink into fashion as the art that was just as political as rapping could get, and then we just went along with the trend, because we needed more unity. 

By copying the urban world, fashion became more reachable, more wearable, less pretentious. The unity that came with the spirits of the streets offered brands like Gucci or Vuitton (menswear) more recently a new image that made their brand go from forgotten older lady's handbag to trendsetter. In a world where unity is key and lacking, fashion and rap have managed to recreate just what we needed, through streetwear.

Si vous avez aimé ou détesté mon article, vous pouvez me le dire juste en dessous, en commentaire! Et puis, n'oubliez pas de me dire ce que vous pensez de l'envahissement du streetwear dans le monde de la mode, et de l'influence des rappeurs sur le phénomène. 

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