LA MODE SANS GENRE
Les anglos saxons appellent ça "ungendered clothing" ou encore "gender fluid clothing": un nouveau point de vue sur la mode qui consiste à ne pas s'intéresser au genre derrière le produit mais plutot à son aspect artistique. Gigi Hadid, mannequin phare de ces dernières années, exprimait l'idée assez simplement dans son interview avec Vogue en Juillet dernier:
J’avais 15 ans quand j’ai acheté ma première chemise dans le rayon hommes d'H&M. Non pas parce que j’avais quelqu’un pour qui l’acheter – mais parce que je trouvais que la coupe était mieux, qu’il y avait quelque chose de différent qui m’allait bien. Aujourd’hui, de plus en plus de créateurs ne font plus la différence entre les habits qu’ils créent pour des femmes, et ceux qu’ils ne voient aller qu’à des hommes.
En fait, dans une société où tous les rôles des genres sont prédéfinis, le fait de porter ce qui ne nous est pas destiné revient à former une sorte de révolte. Et cette révolte est entrain de définir le nouveau monde de la mode – notamment par la montée en puissance de ce qu’on appelle le streetwear.
Selon Olivier Rousteing, directeur artistique de Balmain, aujourd’hui, « on ne cherche pas à être défini ». Les garçons se maquillent, les filles mettent des habits d’homme – ils n’ont pas peur d’aller chercher plus loin pour retrouver qui ils sont. Pas besoin de tout catégoriser.
C’est un changement qu’on remarque tout particulièrement dans la culture pop – notamment à travers certains artistes comme Pharrell Williams, dont le collier de perles au défilé Chanel de 2016 n’est pas resté inaperçu.
D’ailleurs, nombreux sont les artistes musicaux avant lui à avoir décidé d’oublier totalement le rôle qu’on attitrait à leur genre – je pense notamment à David Bowie, Elton John etc. dont les costumes restaient quelque peu féminins, sans qu’on questionne pour autant le fait exprimaient un style qui restait bien à eux, et qu'on assimilait à leur personne avant de leur coller un genre.
D'ailleurs, cette combinaison noire était au départ une création du Japonais Kansai Yamamoto pour femmes. L'artiste représente alors, en 1971, un espèce de révolte qui ne connait aucune barrière des genres, et pour qui homme, femme, hétérosexuel ou homosexuel n'a finalement que très peu d'importance. C'est l'un des messages que la mode est capable de faire passer - et qui se ressent particulièrement aujourd'hui dans la mode de tout les jours - celle qu'on voit dans la rue.
Plus récemment, Gigi Hadid et Zayn Malik ont pris la parole sur ce sujet. Les deux amoureux avouent échanger souvent leurs affaires - et ce sans complexe particulier sur quel genre appartient à qui. Finalement, tout ce qui compte, c'est la manière dont les habits vont à l'un et à l'autre - et on peut dire qu'ils se trompent rarement.
Au delà d'un simple effet de mode, les plus grands créateurs voient en ce concept d'ungendered clothing une manière d'atteindre un plus large public avec les mêmes produits, ce qui a également permis à la Mode Homme de connaître une incroyable ascension ces dernières années.
Le Directeur artistique de Gucci, Alessandro Michele, croit énormément en ce concept. Dans son défilé automne-hiver de 2017, il fait valser ses mannequins hommes et femmes dans le même défiler, absorbés d'une collection flamboyante qui rend difficile la détermination du genre à première vue.
C'est donc une nouvelle ère qui s'annonce - celle dans laquelle des barrières comme le genre se transforment finalement en une façon de se différencier.
Défilé Gucci, Automne Hiver 2017. Cliquez sur l'image pour le défilé complet sur vogue.fr